Un
homme.
Des
montagnes.
Une
vie.
Une vie s'affaiblissant au rythme du chagrin et de la déception.
Parfois,
il suffit d'un regard pour tout changer.
Un
regard pour sauver, un regard pour détruire. Aussi effilé qu'une
lame, aussi précis qu'une flèche. Il vise juste, au plus profond de
nous, pour nous relever ou nous réduire à néant.
Cette
histoire est celle d'un homme qui, aussi banal qu'il puisse l'être,
fit tout son possible pour comprendre quelque chose à la vie. Cet
homme là n'était pas vieux, bien au contraire. Il n'avait ni le
physique d'un top model, ni l'intelligence d'un philosophe. Il était
lui, tout simplement.
Il
n'avait pas vraiment une vue positive de la vie. Il répugnait plutôt
à dire que c'était le plus beau cadeau que l'on puisse recevoir.
Pour lui, le concept de vie et de mort n'était ni un présent ni une
punition. C'était seulement le court naturel des choses. La religion
avait tendance à vouloir sans cesse chercher des explications
divines sur la création du monde et sur les éléments qui
contrôlaient l'écoulement du temps, la météo et toutes ces forces
imparables et imprévisibles. Ce n'était que des sottises pour le
jeune homme, qui ne croyait qu'en la Nature et en lui-même. Pas
qu'il se considérait comme un dieu, loin de lui cette idée, mais
lorsqu'on a conscience d'exister et d'être un phénomène naturel,
alors pourquoi ne pas croire en soi.
Ce
regard, il ne l'oubliera jamais.
« Je
te quitte ». Trois ridicules petits mots, chargés de douleur
et de chagrin. Elle avait parlé calmement, sans la moindre
hésitation, comme si elle avait médité ses paroles longtemps en
avance.
Son
regard était fixe, déterminé. Elle ne fléchirait pas.
Et
puis tout s'était enchaîné. À croire que le malheur entraînait
le malheur, sans laisser la plus petite place pour un peu de bonheur.
Morts, guerres, autant de mauvaises nouvelles venues pourrir en
profondeur le moindre sentiment positif encore présent.
Il
lui prenait alors des envies de partir, loin, là où rien ni
personne ne pourrait l'atteindre. Il goûterait à une solitude
bienfaisante et réconfortante.
Il
avait choisit la montagne, les pics escarpés d'une chaîne enneigée.
Il
était monté au sommet, révélant à ses yeux toute la splendeur de
la Nature et la petitesse de l'Homme, qui se permettait de commander
à celle qui l'avait créé.
Emmitouflé
dans son manteau, il regardait le soleil darder ses millions de
rayons sur une mer de nuages blancs et purs, recouvrant toute
civilisation.
Et
alors, il réfléchissait. Au sens de la vie, à son rôle à lui,
petit être perdu dans l'immensité céleste.
L'espoir
de voir sa vie redevenir comme avant était piétiné comme la neige
sous ses pieds.
Quel
était le but de sa vie ? Souffrir en attendant son heure ou
accélérer le cours des choses ? Il y avait souvent pensé, mais
lorsqu'il regardait ce paysage parfait, il lui prenait l'envie de
rester là, perché sur son sommet éternellement. Mais hélas, rien
n'est jamais éternel, et il le savait.
Usure.
Désespoir.
Mort.
Quelques
flocons tombaient en scintillant. La main tendue, il les regardait
fondre lentement, comme l'Espoir s'évanouissant peu à peu.
Soupir.
Que la vie peut être triste et brève parfois...
Il
n'y avait pas dans le monde qui s'étalait loin au-dessous de place
pour lui. Mieux valait finir ses jours ici, dans la quiétude et la
solitude.
Il
se sentait si grand, si puissant, du haut de la montagne, qu'il
appelait presque sa montagne. Il se sentait bien, il se
sentait lui-même.
Le
Moi...
Ce
simple mot, grand et chargé de sens, capable de briser toute bonne
volonté de s'oublier au dépend des autres.
La
masse voluptueuse des nuages atténuait les moindres bruits de vie.
Il
regardait en bas, sans ressentir de vertige. Seulement une forte
attraction de se laisser tomber, porté par la brise légère, tel un
oiseau. Peut-être pensait-il que les nuages amortirait sa chute,
l'enveloppant dans une douceur et un confort digne de la meilleure
publicité pour un quelconque produit sans intérêt.
Tomber.
Voler.
Rêver.
Les
bras écartés, comme en signe d'offrande, il s'était avancé au
point le plus abrupt et escarpé. Regardant le vide sans la moindre
peur, il s'était laissé tomber...
Il ne verrait
jamais le chagrin et le regret qui l'avait envahit, elle, qui avait
était la cause de tout.
Le
désespoir entraîne la mort, qui entraîne le chagrin. Une boucle
sans fin, qui ne se terminera que dans la mort.
Un
homme.
Des
montagnes.
Une
vie.
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